Confinement et paroles d’une “personne à risque”
Les quelques lignes qui vont suivre sont celles d’un septuagénaire qui a commencé sa vie dans un milieu pauvre et dans le manque. Je me suis donc construit en défiance de cette promesse par la « société de consommation » du toujours plus pour le toujours mieux. Ma génération pour l’écrasante majorité s’est, elle, vautrée dans cette promesse jusqu’à en oublié la valeur de l’humain et de la nature. Hélas, hélas!
Le concept de société de consommation renvoie à l’idée d’un système économique et social fondé sur la création et la stimulation systématique d’un désir de profiter de biens de consommation et de services dans des proportions toujours plus importantes. (Wikipédia, La société de consommation)
Au moment où nous sommes en pleine réflexion sur la notion d’effondrement, nos gouvernants ont décidé de notre confinement dans le plus grand désordre dû à leur incurie. Depuis de nombreuses années nous sommes incapables de réagir face au désastre écologique qui nous attend et voilà que par le plus petit et le plus ancien morceau de vivant, un virus, la nature nous fait signe et nous montre la fragilité de nos sociétés et la prétention du système dominant. Il semblerait que dans sa grande sagesse elle élimine d’abord les plus âgés, ceux dont on disait qu’ils seraient centenaires en grand nombre et dont la retraite faisait vaciller l’économie. Par milliers dans les EPADH et dans les hôpitaux, s’éteint une génération consumériste dans une certaine indifférence de leurs futurs héritiers qui confondent « social » avec « humain » et s’en remettent à autrui pour le soin de leurs parents. Il s’agit d’une génération à qui on a vendu l’idée que le mieux serait le « plus » alors qu’aujourd’hui le mieux n’est pas le plus mais très certainement le « suffisant », peut-être même le « moins ».
Le récit dominant d’une humanité transitant par étape d’un système à un autre dans un monde aux ressources infinies est une erreur. L’avenir sera « moins de biens » et « plus de liens », c’est-à-dire « plus d’être » et « moins d’avoir » ou bien il sera sombre. L’individualisme social a engendré une certaine indifférence à l’égard du fait générationnel avec les pertes qui vont avec, pertes de savoirs et d’expérience, mais aussi perte du sens de l’avenir et incapacité à offrir aux plus jeunes un avenir désirable et un récit enthousiaste. Il faut bien reconnaître qu’est coupable cette génération, qui est aussi la mienne, incapable de penser l’avenir alors que dès les années 60/70, voire avant, des scientifiques, des philosophes et des politiques tiraient la sonnette d’alarme.
Nous n’avons pas réagit au développement qui s’est fait contre la nature ni à la mondialisation et à l’exportation de notre modèle consumériste de développement. Nous n’avons rien fait face aux dérives de l’économie sociale pourvoyeuse d’emplois et d’irresponsabilité. Nous nous en sommes remis aux autres pour élever nos enfants, pour veiller sur nos parents, etc. Nous n’avons même pas su tirer enseignements de nos défaites lorsque nous étions militants. Nous méritons bien notre sort en EPADH ou ailleurs. La relance de l’économie passera sans aucun doute par une « relance » abondée par les héritages et une certaine disponibilité de capitaux pour les héritiers. Ceux-ci ne manqueront pas d’avoir, encore et encore, des projets consuméristes, à moins que..
Heureusement, nombre de jeunes s’engagent sur d’autres voies, ce sont eux aujourd’hui qu’on retrouve aux premières loges pour dire non à ce système mortifère porté par une bourgeoisie dont on ne peut que constater la dégénérescence morale dans leur avidité.
« C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain ne l’écoute pas » Victor Hugo, Carnets intimes